Ils nous apprennent tout d’abord que le télétravail doit être contractualisé entre les parties, ce qui implique soit que ses conditions d’application sont définies dès la signature du contrat, soit qu’il est nécessaire de les définir dans le cadre d’un avenant.

Dans ce dernier cas, cela peut ouvrir la porte à une renégociation de la totalité du contrat et même si l’employé n’est pas tenu de l’accepter, un refus peut compliquer les relations futures avec l’employeur.

Dès le départ, le fait de demander à faire du télétravail représente donc un risque potentiel, même s’il peut être relativement faible si l’employé a de bonnes relations avec son employeur.

L’article L1222-10 nous apprend de plus que l’employeur est tenu de prendre en charge tous les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci.

Et si son principe me semble logique, dans les faits, parvenir à trouver une méthode permettant de calculer le taux d’utilisation d’un abonnement internet (et de la consommation électrique du matériel correspondant) dans le cadre du télétravail et la faire accepter par son employeur peut être une véritable partie de plaisir, notamment en cette période de crise où le moindre euro dépensé doit être justifié.

Une solution serait d’avoir deux abonnements téléphoniques, donc deux lignes téléphoniques distinctes, d’autant que l’employeur peut décider, avec l’accord de l’employé, de contrôler ou de restreindre l’utilisation qui peut être faite de la connexion.

Cependant, dans les faits, peu de logements disposent nativement de deux lignes, et l’installation d’une seconde ligne a un coût, ce qui peut donc représenter un frein supplémentaire à la mise en place du télétravail.

Quant à la maintenance du matériel, si votre employeur ne vous fournit pas le matériel, je souhaite bien du plaisir à celui qui voudra faire prendre en charge la maintenance de son matériel personnel.

Lors de la négociation du contrat ou de l’avenant, il faut donc impérativement parvenir à un accord clair et précis sur ces points et cela peut être très difficile, surtout si l’employeur veut optimiser des coûts et sécuriser ses investissements.

Par ailleurs, l’Accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005, qui n’a pas été abrogé par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 qui définit les articles du Code du travail précités, encadre plus précisément les obligations respectives des deux parties, et plus particulièrement celles relatives à l’hygiène et à la sécurité telle que définie par l’article L4121-1 du Code du travail.

L’employeur a ainsi une obligation de sécurité envers ses salaries, ce qui l’oblige par exemple à s’assurer, avant de mettre en place le télétravail, de la conformité du domicile du salarié, et notamment de celle des installations électriques.

De plus, l’employeur peut demander l’inspection du lieu de travail du télétravailleur afin de s’assurer de sa conformité vis-à-vis des règles d’hygiène et de sécurité de l’entreprise.

Si l’employeur souhaite respecter le Code du travail et donc ne pas avoir de problèmes avec l’inspection du travail (et quiconque a subi une fois un contrôle n’a vraiment pas envie de repasser par là une seconde fois), il y a donc un certain nombre de choses à faire non seulement avant la mise en place du télétravail, mais également par la suite et de manière récurrente.

De plus, il faut prendre en compte la problématique de l’assurance.

L’employé doit en effet être titulaire d’une assurance multirisque habitation, et c’est généralement le cas, mais l’employeur doit également assurer les éventuels équipements fournis au salarié pour qu’il puisse assurer sa mission dans le cadre du télétravail, ainsi que les éventuels dégâts que ce matériel peut provoquer au domicile du salarié.

Outre la négociation ou la renégociation du contrat de travail, l’employeur devra donc également négocier avec son assureur pour couvrir son salarié, en plus de devoir s’assurer de la conformité de son domicile.

Si le télétravail n’est pas encore en place dans l’entreprise, le faire représente donc une masse importante de travail pour l’employeur à différents niveaux, notamment si un unique salarié en fait la demande.

Car de plus, en fonction de la taille de l’entreprise, le Comité d’entreprise et Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de travail, aka le CHSCT, devra être également consulté (si vous voulez énerver un patron d'une entreprise de taille moyenne, placez ce sigle dans votre conversation)…

Et si l’on ajoute à cela une volonté des employeurs de garder le contrôle sur la productivité de leurs salariés (comme s’il n’était pas possible de faire autre chose que son travail au bureau) et donc une résistance au télétravail relativement importante, parvenir à le mettre en place peut être dans le meilleur des cas une mission de longue haleine, et dans le pire une entreprise vouée à l’échec dès le départ.

Et il ne s’agit là que des obligations qui m’ont le plus interpellé lorsque je me suis renseigné sur le sujet ou ceux qui ont posé problème lorsque ma femme a demandé à télétravailler.

Le télétravail bénéficie donc aujourd’hui d’un statut juridique extrêmement balisé dans le Code du travail, voire même trop balisé, ce qui peut rendre sa mise en application plus que difficile dans les entreprises dans lesquelles il n’est pas encore en place ou qui sont soucieuses de respecter à la lettre le cadre de la loi, ce qu’on ne peut leur reprocher.

Il serait donc appréciable que tout cela soit allégé et/ou simplifié, comme d’ailleurs beaucoup d’autres choses au niveau de la Loi française.