Tout d’abord, l’informatique en général et le développement logiciel en particulier sont des domaines qui évoluent extrêmement rapidement.
Du coup, dans l’esprit des recruteurs, un « jeune » est le seul à pouvoir appréhender et maîtriser correctement la programmation, car son savoir est forcément beaucoup plus corrélé à ce qui se fait aujourd’hui et maintenant qu’à celui possédé par un « vieux ».
De plus, le « jeune » a un avantage incomparable sur le « vieux » sur le marché du travail : il coûte beaucoup moins cher, car l'expérience se paye !
J’ajoute que parfois le « vieux » aime en général que les choses soient faites correctement et fort de son expérience, il n’hésite pas à le dire haut et fort, tout comme il n’hésite pas à dire que ce qui a l’odeur de la merde, l’apparence de la merde ainsi que sa couleur est forcément de la merde.
Du coup, non seulement ses connaissances sont perçues comme « has been » et son salaire frôle la stratosphère comparativement à celui d’un jeune aux connaissances en théorie plus affûtées, mais en plus, il est perçu comme un emmerdeur.
Ou bien, assez paradoxalement, il est « trop qualifié pour le poste » qu’il convoite, comme si tous les problèmes du Monde avaient déjà été résolus et qu’il était donc devenu du jour au lendemain totalement inutile.
Et le pire, c’est que c’est bien souvent le cas, car l’employeur potentiel n’a effectivement pas réellement besoin de ses compétences.
Ou encore, avec le temps, l’expert s’est trop spécialisé dans une technologie de niche et dispose alors de compétences certes pointues, mais bien trop marginales sur le marché du travail pour pouvoir lui permettre de retrouver un emploi en adéquation avec ses possibilités et ses motivations.
En bref, malgré le fait que l’expérience n’a pas de prix, qu’elle est indépendante de la technologie, qu’elle devrait être écoutée ainsi que respectée et que de plus elle est bénéfique pour les « jeunes » lorsqu’elle est partagée, plus le temps passe et moins un informaticien a de chance de pouvoir s’épanouir professionnellement parlant.
Du coup, passé un certain âge, il est bien souvent difficile pour lui de trouver chaussure à son pied lorsqu’il est à la recherche d’un emploi.
Dans le pire des scénarios, il accepte alors un travail qu’il considère comme alimentaire et dans lequel il sait pertinemment qu’il ne pourra pas s’épanouir.
Ce qui était autrefois sa passion devient alors une charge, une source de stress et se rendre à son travail lui demande chaque jour un effort de plus en plus grand.
La dépression n’est alors pas très loin.
Je fais là une bien vilaine caricature, me direz-vous.
Je n’en suis pas si certain.
Alors, comment éviter d’entrer dans cette spirale infernale, étant donné qu’arrêter le temps est impossible ?
Je n’ai pas la réponse à cette question, juste une suggestion : parallèlement à votre activité professionnelle, développez un projet personnel qui vous tient à cœur et divulguez son code source !
Vous pourrez alors travailler à votre façon, à votre rythme tout en enrichissant et partageant vos connaissances.
Cela vous permettra également de nouer des liens parfois étroits avec d’autres développeurs partageant votre vision du métier et vos valeurs et vous construirez alors peu à peu un réseau de connaissances susceptibles de vous aider à vous épanouir aussi bien personnellement que professionnellement.
De plus, vous obtiendrez progressivement un portfolio visible par tout le monde démontrant que votre âge n’est pas un problème, tout en faisant quelque chose que vous aimez.
Et si votre projet est suffisamment pertinent et bien conçu, peut être qu’un jour, vous pourrez en vivre !
Et surtout, votre projet vous permettra d’occulter sinon totalement au moins partiellement les éventuels tracas que vous causera votre activité professionnelle, notamment lorsqu’elle sera devenue purement alimentaire pour une raison ou pour une autre.
Votre projet sera alors à la fois un refuge et un petit coin de paradis informatique qui vous permettra de surmonter plus facilement les aléas de la Vie, d’être fiers de ce que vous faites, de vous sentir utile et surtout de vous éclater sinon quotidiennement au moins régulièrement.
Certes, cela vous demandera certainement des sacrifices, comme celui de regarder un peu plus l’écran de votre ordinateur et un peu moins celui de votre téléviseur, et bien alors de lancer votre IDE au lieu du dernier jeu à la mode.
Mais si ces sacrifices vous permettent d’être heureux en vivant votre passion, voire d’en vivre un jour, ils en valent largement la peine !
9 réactions
1 De nico_somb - 22/05/2013, 15:00
Amen.
Je n'ai pas encore la quarantaine (pas encore la trentaine non plus :p) mais cette idée de "trop vieux" dans nos métiers me fait "peur" également ...
2 De Kyoku57 - 22/05/2013, 15:00
Ok ... je commence à comprendre pourquoi tu t'es lancé dans Atoum ... c'est par peur de mal vieillir ^^
3 De bthuillier - 22/05/2013, 15:23
Je suis encore jeune, mais je pense que quand on est développeur, dans l'informatique en général il est important même hors de ses heures travailler de faire de la veille, des projets perso pour être constamment "à la page" et ne pas s'enfermer dans des niches. D'une part d'un point de vue professionnel ça permet je pense de pouvoir retrouver plus facilement du boulot et ensuite je trouve que d'un point de vue épanouissement personnel c'est toujours intéressant d'apprendre des nouvelles choses. D'ailleurs je recommande à tous les développeurs ou apprenti développeurs à lire http://www.amazon.com/Clean-Coder-C...
4 De Cyrano - 22/05/2013, 17:23
Mouais... que devrais-je dire, moi qui suis rentré dans la catégorie des quinquas cette année...
Mais formulé autrement, ce billet pose la question : comment lutter contre l'âgisme qui sévit chez les recruteurs des entreprises en informatique. Et effectivement, à part monter un projet personnel ayant un tant soit peu d'envergure ou encore monter sa propre boite, je n'ai pas trouvé de réponse non plus.
Maintenant, je serait plus circonspect avec l'aspect « épanouissement » tout simplement parce que j'avoue ne pas trop comprendre ce que ça veut réellement dire. Je n'ai jamais eu de crise de la trentaine, pas davantage de la quarantaine. Par ailleurs, je me reconnais très volontiers lorsqu'est décrit le coté « emmerdeur » des « anciens », et ça ne date pas d'hier. Ce qui me dérange, c'est qu'une certaine forme de perfectionnisme et une expérience professionnelle solide puissent être considérées comme handicapantes par un recruteur. Je me console en partie ne me disant que l'interlocuteur est un commercial avec tous les défauts d'un technocrate qui n'a que les mots « bénéfice », « profit » (sous-entendu à court terme) ou « ROI » en tête et qu'il fait des pirouettes verbales pour m'envoyer balader avec les prétextes les plus fantaisistes pour ne jamais avouer qu'il préfère un jeune beaucoup plus facile à manier. Alors qu'avec de l'expérience, on a vu neiger et on ne se laisse plus marcher sur les pieds avec la même bonne volonté (d'aucuns diraient « naïveté »).
Ce sont des comportements tout à fait détestables certes, mais je crois que le plus triste de l'histoire, c'est que l'entreprise se prive d'avenir en ayant au sein de ses équipes des vieux routiers capables de transmettre aux moins expérimentés et, ce faisant, entretiendrait une meilleure assise à l'entreprise elle-même. Mais pour ça, il faudrait que les technocrates aient une vision à plus long terme que le prochain bilan comptable... Et c'est oublier un peu trop vite également que des binômes jeune-loup/vieux-loup peuvent se montrer d'une efficacité redoutable, les deux apprenant autant l'un de l'autre. C'est vrai qu'on a de l'expérience, mais on est pas forcément au courant des toutes les dernières méthodologies, des dernières évolutions sur certains points, et l'ancien aura grand bénéfice à écouter tout autant le plus jeune que ce dernier aura tout à gagner à observer avec attention l'ancien qui lui évitera des boulettes parfois basiques. Tout le monde y gagne, les deux apprennent l'un de l'autre,le travail est beaucoup plus rapide et efficace, et le résultat sera d'autant plus intéressant pour le client, donc pour l'entreprise qui fidélisera plus facilement ce client...
Mageekguy, peut-être dans tes équipes de développement as-tu des binômes de ce genre ? Il est dommage que tu n'en aies pas fait mention dans ce billet, je suis certain qu'il y aurait bien des choses intéressantes à y découvrir.
My 2¢
5 De neolao - 22/05/2013, 18:15
Merci pour cet article. Je suis dans le même cas.
Limite j'ai peur de ne pas trouver de boulot à 50 ans. Ça va probablement être alimentaire pour un poste de chef.
6 De mageekguy - 23/05/2013, 12:20
@Cyrano : La moyenne d'âge étants aux alentours des 33 ans dans mon équipe, malheureusement, faire des binômes padawan/jedi n'a pas de sens dans notre contexte.
Par contre, nous travaillons souvent en tandem et nous faisons de la revue de code.
Et au passage, je te remercie pour tes commentaires toujours pertinents et argumentés.
7 De Sébatien - 25/05/2013, 07:10
Ce débat me fait penser à ça :
http://programming-motherfucker.com...
C'est bien de visiter ce site pour se remettre les idées en place de temps en temps !
8 De DevAussiVieuxProfessionnellementParlant - 28/05/2013, 10:16
... j'ai également des interrogations un peu similaires depuis la naissance de mes enfants : entre les couches du dernier, l'école du premier , la nounou , les horaires stricts, les enfants malades j'en passe ... c'est dur dur de pouvoir rivaliser avec des p'tits jeunes qui peuvent se permettre de rester tard le soir au boulot, de continuer à bosser le soir et le week end, d'être maléables a souhait et qui demandent un salaire de misère en ayant un enseignement plus récent ... à 17 ans j'étais passionné par l'informatique là ca devient plus alimentaire ... je bosse en agence web (je code sur 2 à 10 sites internet par jour ... c'est limite du travail a la chaine) mais je veux changer sans trop savoir encore vers vers quoi me tourner ... rester dans l'informatique ou partir ... en attendant bonne idée de faire des projets personnels pour reprendre du plaisir a coder un peu merci pour l'idée ...
9 De gaetanm - 13/08/2013, 10:18
Excellent billet !
J'ai bien aimé ce passage :
"... tout comme il n’hésite pas à dire que ce qui a l’odeur de la merde, l’apparence de la merde ainsi que sa couleur est forcément de la merde."
Je n'ai que 22 ans et je me reconnais déjà dedans, c'est grave docteur ?