Peux-tu te (re)présenter en quelques mots ?

Je vous renvoie à ma première présentation pour l'essentiel.

Et depuis, j’ai cessé d’écrire dans des magazines d’informatique et j’ai organisé des Jam avec la Game Dev Party, association dont je viens de me retrouver présidente, ainsi qu’un Coding Goûter lyonnais pour que les enfants mettent les mains dans du code.

Je reste libriste et je me passionne pour l’impression 3D, je suis sur le point de me monter une Reprap et je suis en train de chercher les émanations toxiques que cela peut faire, pour savoir dans quelle pièce de mon appartement je peux la mettre.

Concernant le fond de cette interview, je suis encore développeuse PHP sur mon intitulé de poste, sauf que je fais actuellement du développement frontend avec AngularJS et LESS, le tout dans une petite équipe de trois développeurs. Nous sommes en train d’appliquer Scrum « by the book » alors ce n’est pas toujours évident. Et je travaille chez PMSIpilot qui est un éditeur logiciel, et je pense que cela influence ma vision de l’évolution de PHP.

J’ai même été m’initier à Ruby avec Rails For Zombies et à la syntaxe de Python avec CheckIO, un jeu pour apprendre (http://www.checkio.org). Au passage, je vous conseille de le faire aussi pour comprendre mieux la programmation.

Que penses-tu de l’évolution de PHP depuis l’abandon du développement de PHP 6 ?

Comme j’ai arrêté de suivre pas à pas les évolutions des versions de PHP, je suis renseigné par à-coups, lors de billets et de conférences et c’est très impressionnant.

PHP implémente enfin des fonctionnalités que j’attendais depuis longtemps, comme finally ou les closures.

Cependant, faisant surtout du Javascript, je travaille au jour le jour avec des fonctions anonymes, alors je ne suis pas frustrée :).

Avec le recul, penses-tu que la communauté des contributeurs a tiré toutes les leçons des erreurs commises avec PHP 6 ?

Ne suivant pas assez les histoires d’internals, je ne me permettrais pas de répondre avec certitude.

PHP évolue aujourd’hui beaucoup plus vite que par le passé, penses-tu que ce soit une bonne chose ?

C’est une bonne chose que PHP évolue, puisque cela lui permet de rattraper son retard. Je veux dire par là que PHP évolue dans le sens d’être considéré comme un langage professionnel et à part entière, ce qu’il n’est pas encore tout à fait pour moi. Je m’appuie sur l’apéro PHP-Python qu’on a fait avec l’AFUP Lyon il y a quelques semaines, où l’on a pu constater la méconnaissance de PHP de la part des développeurs Python.

Le bémol que je mettrais sur cette vitesse de développement est la partie « business », car maintenir un parc de machines et une application à jour devient compliqué.

Si PHP évolue dans sa pénétration dans le monde de l’entreprise, c’est aussi un paramètre dont il faut tenir compte. Les frameworks en open source en tiennent compte lorsqu’ils prévoient des licences LTS.

De nouveaux langages comme Go, Dart, Node.js, Scala ou Closure sont venus s’ajouter à la liste des concurrents de PHP au côté de Ruby et python et ils semblent avoir un gros potentiel. En conséquence, penses-tu que PHP soit encore un bon choix actuellement pour commencer un projet ?

On peut déjà envisager le but du projet : open source et grand public, open source et pointu, site web de e-commerce avec beaucoup d’évolutions à faire, scripts pour faire interagir des automates entre eux, etc. Ce qu’un développeur peut être amené à créer dans sa vie est plutôt varié.

Pour commencer un projet, il faut donc envisager plusieurs paramètres, les forces en présences (et pas qu’au niveau technique), le business modèle du projet, l’argent disponible pour outiller les développeurs en matériel et en logiciel, les évolutions et le rythme de développement, ou bien encore le workflow avec par exemple le besoin de présenter rapidement des POC aux commerciaux ou bien la nécessité d’avoir un système de mise à jour du projet très performant.

On peut aussi évoquer les connaissances de l’équipe. Dans mon entreprise, nous avions par exemple de nombreux développeurs PHP et il était donc plutôt sensé de démarrer un nouveau projet avec cette technologie. Pour autant, des projets ont été démarrés sur des technologies Java parce que des partenaires avaient des connaissances Java.

Disons qu’il ne faut pas écarter PHP sous prétexte que ce langage est ancien, il évolue encore, les développeurs PHP sont nombreux, et de fait les bons développeurs PHP sont de plus en plus nombreux.

Quelles ont été pour toi les évolutions les plus significatives dans l’univers de PHP depuis 2010 ?

C’est très local, mais l’antenne lyonnaise de l’AFUP est de plus en plus dynamique et continue d’exister.

C’est pour moi une preuve du dynamisme de l’éco-système PHP.

Je constate aussi, avec surprise et plaisir, que les systèmes de publication de contenu se maintiennent parfaitement. Drupal et eZ Publish continuent à livrer leurs produits et à vendre leurs services dans la partie business, tandis que Wordpress continue sur sa lancée et que Dotclear reprend un peu son souffle pour mieux repartir. Ces outils sont le moyen d’amener des clients à PHP selon moi, car ce sont des points d’entrée vers la technologie.

Et en parallèle,j’ai l’impression que les frameworks s’harmonisent avec tout ce qui est PSR-0, pour le meilleur (interopérabilité, migration) et le pire (une intrication et une dépendance entre frameworks ainsi qu’une perte des connaissances techniques de bas niveau des développeurs).

De quoi aurais-tu besoin aujourd’hui dans PHP dont tu ne disposes pas ?

À mon niveau, dans mon travail, j’aurais besoin de migrer vers une version plus récente. Je ne développe pas sur la dernière version de PHP car il y a cette problématique d’industrialisation et de montée de version. Cela demanderait beaucoup trop de temps de suivre le rythme de publication des nouvelles versions de PHP.

Au niveau des développeurs, je dirais qu’il manque du « réflexe qualité ». Je pense à la manière de livrer du code de qualité. Il est connu qu’en théorie, il faut écrire des tests automatisés par exemple (hahaha, dire cela chez toi, c’est rigolo), qu’il existe moult outils pour gérer de l’intégration continue, des métriques sur le code, comme Sonar par exemple, et pourtant, à chaque conférence à laquelle je participe, des développeurs paraissent découvrir ces concepts. J’en suis très étonnée. Est-ce que cela vient de la manière dont est enseignée la programmation ou de la manière dont est vue PHP ?

Plus globalement, dans la partie où je défends PHP par rapport à d’autres langages, où je prouve sa validité, il manque des exemples positifs qui disent « on fait du PHP et on aime cela » en dehors de la communauté. Les développeurs qui ne baignent pas dans PHP n’ont pas de références nombreuses, de retours d’expériences solides.

Au vu de tes réponses précédentes, est-il possible de dire que tu crois toujours en l’avenir du langage ?

Je crois en l’avenir de PHP, car il y a des développeurs, des bons développeurs et des nouveaux développeurs chaque jour. Il y a des projets écrits en PHP qui foisonnent et des projets à créer qu’on peut réaliser en PHP.

Cependant, je ne crois pas que l’avenir de PHP soit sur une voie royale et toute tracée. Les autres langages aussi continuent d’évoluer et PHP n’est pas forcément en avance techniquement parlant, même si le rythme de son développement s’est considérablement accéléré. Donc pour perdurer, le monde PHP doit continuer à évoluer et éventuellement s’ouvrir, pour trouver de nouvelles niches à exploiter.