Je constate en effet quasi quotidiennement dans mon travail un manque de confiance plus ou moins prononcé et cela aussi bien à mon encontre qu’envers autrui.
Ainsi, les personnes à qui l’on demande un avis sont dans la plupart des cas obligées d’argumenter et de défendre leur point de vue.
Et bien souvent, il s’ensuit des conflits plus ou moins importants et visibles, des tensions, de la rancœur, une démotivation, de la colère, et la liste est loin d’être exhaustive…
Cette défiance induit donc un grand nombre de sentiments négatifs qui sont tout sauf constructifs à plus ou moins court terme.
Après réflexion, j’ai identifié au moins trois explications possibles à ce comportement.
- L’avis de « l’expert » peut entraîner la remise en cause de projets, d’envies, de rêves qui ne doivent absolument pas être abandonnés pour des raisons techniques, commerciales ou affectives.
- Il peut également arriver que l’opinion de « l’expert » implique à plus ou moins brève échéance des efforts émotionnels ou financiers qui sont incompatibles avec les possibilités du moment.
- Et enfin, il est également possible que « l’expert » ne soit pas reconnu comme tel par l’ensemble des personnes concernées par son avis et en conséquence ce dernier ne fait jamais consensus.
Et il y a certainement d'autres raisons, mais en fait, peu importe, car elles sont toutes mauvaises, sans la moindre exception.
En effet, lorsque vous demandez l’avis d’une personne individuellement ou collectivement, vous considérez implicitement que son expertise a suffisamment de valeur pour que cela en vaille le coup et vous lui faites donc par définition confiance.
Donc, si vous mettez son avis en doute parce qu’il ne vous convient pas pour une raison ou pour une autre, vous ne trahissez pas seulement la confiance que vous aviez en lui, vous trahissez également la confiance que vous avez envers vous-même !
De plus, si vous avez jugé utile de demander l’avis d’un « expert », c’est que vous avez pensé ne pas avoir les compétences nécessaires et suffisantes pour vous prononcer correctement.
Alors, de quel droit pouvez-vous remettre en cause son avis ?
Donc, que vous soyez employeur ou client, la prochaine fois que vous demanderez l’avis d’une personne que vous considérez comme un expert dans son domaine, faites-vous une faveur : quelle que soit la réponse que vous obtiendrez, n’en discutez surtout pas le bien-fondé.
Vous éviterez alors de perdre du temps et celui de votre « expert » dans une vaine discussion et vous ne risquerez pas de blesser son amour-propre et donc d’hypothéquer vos relations futures.
Au contraire, vous gagnerez du temps, temps que vous pourrez mettre à profit pour éventuellement demander un second avis afin de pouvoir prendre votre décision en toute connaissance de cause.
Vous passerez alors d’une attitude négative et destructrice à une attitude positive et constructive !
6 réactions
1 De Éric - 11/02/2013, 18:17
Attention à ne pas confondre assujettissement et confiance.
L'expert est un contributeur (parmi d'autres). Quand il est externe on appelle d'ailleurs ça un conseil/consultant.
L'expert n'est pas forcément le décisionnaire (et en général il ne l'est pas). Attention à ne pas confondre les rôles.
Évidemment quand le décisionnaire se défie de l'expert, l'intérêt de ce dernier est largement discutable, et la pertinence de la décision l'est tout autant. Pour autant si la décision appartient au décisionnaire, c'est bien qu'il peut et doit pouvoir prendre une décision différente de celle de l'expert.
Je suis totalement en désaccord avec l'idée exprimée dans les termes "de quel droit pouvez-vous remettre en cause son avis ?"
L'avis d'un conseil est parfois jugé nécessaire pour que le décisionnaire prenne une décision, pas pour la prendre à sa place. L'argumentation (ou le manque de), les potentielles nouvelles idées non envisagées jusqu'alors (ou le manque de) sont généralement bien plus importants que l'avis de l'expert.
2 De mageekguy - 11/02/2013, 18:18
@Éric : Suite à une erreur de ma part, ce billet est paru avant qu'il ne soit finalisé et en conséquence, il ne reflète pas exactement ce que je pense, d'ou peut être le point que tu soulignes.
Évidemment que l'expert n'est pas le décisionnaire et je suis parfaitement d'accord avec toi sur le fait que ce n'est pas à l'expert de prendre la décision finale.
Il n'est, même si je n'aime pas trop l'expression, qu'un outil d'aide à la décision pour le décideur.
Par contre, si le décideur demande l'avis d'un expert, c'est parce qu'il pense ne pas avoir toutes les billes nécessaires pour prendre la meilleure décision possible parce qu'elle nécessite des compétences dont il ne dispose pas ou qu'il maîtrise imparfaitement.
Et c'est donc parce que décideur fait confiance à l'expert et à ses compétences qu'il le consulte.
Sinon, à quoi bon le faire ?
En conséquence, je ne comprend absolument pas pourquoi le décideur aurait le droit de remettre en cause l'avis de l'expert.
Il peut lui déplaire, mais ce n'est pas une raison suffisante pour le discuter, ne serait-ce que parce que ça n'a rien d'objectif.
De plus, vu que le décideur n'a pas le bagage nécessaire, la discussion ne peut qu'être stérile pour tout ce qui touche au domaine de l'expert.
Pour être clair, dans mon contexte professionnel, je vois bien trop souvent des commerciaux ou des responsables qui ne comprennent absolument rien à la technique (ce n’est pas une critique, juste un fait) qui demande, par ailleurs fort intelligemment, un avis aux « techniciens qui savent », pour reprendre une expression d’un gag d’Achille Talon.
Mais plutôt que d’en tenir compte ou de le confronter à un second avis afin de l’invalider ou de le confirmer, ils préfèrent venir discuter sur le domaine de compétence de l’expert avec ce dernier afin d’essayer de le faire changer d’opinion.
Pire encore, et c'est du vécu, ils peuvent même aller jusqu'à lui fournir de nouvelles informations erronées ou imprécises afin de « l’aiguiller » vers une autre solution qui colle mieux à leurs contraintes.
L'exemple qui me vient immédiatement à l'esprit est celui, malheureusement très classique, du commercial qui demande un chiffrage et qui vient ensuite discuter avec le ou les développeurs pour essayer de faire passer le nombre de jour de 300 à 10 à périmètre fonctionnel égal en commençant ses phrases par « Yaka » ou « C'est pourtant simple, il suffit de ».
C’est de mon point de vue symptomatique d’un manque de confiance, et dans le pire des cas, c’est même du foutage de gueule en règle.
Par contre, je peux tout à fait comprendre le discours d’un décisionnaire qui dirait qu’il a décidé de ne pas suivre l’avis d’un expert parce qu’il avait des contraintes diverses et variées incompatibles.
Pour reprendre mon exemple précédent, j'adorerais qu'un jour un commercial vienne me dire qu'il a effectivement vendu 10 jours parce qu'il fallait faire cette vente pour assurer l'avenir de la société mais qu'il l'a fait en tout connaissance de cause, qu'il sait pertinemment que le développement demandera effectivement 300 jours et qu'il en a avisé qui de droit.
Après tout, commercialement, c'est lui l'expert !
3 De Eric - 11/02/2013, 18:53
Plus que le "j'ai pris une décision tierce parce que je prends en compte d'autres critères/informations", je veux juste exprimer que le "j'ai pris une autre décision parce que l'expert ne m'a pas convaincu" est aussi tout à fait valide.
Tenter de contraindre le conseil de l'expert l'est effectivement beaucoup moins mais fréquent. Quand tu fais du conseil, il y a deux trois types de missions :
La première est de très loin celle que j'ai le plus rencontrer. Ca ne veut pas dire que des fois les conclusions ne sont pas contraires (et c'est généralement très bien accueilli), mais la mission est en fait bien plus humaine que technique (mais pour ça il faut déjà que la technique soit incontestable).
La seconde est de loin la plus rare, et généralement c'est pour des missions très courtes et délimitées. En même temps c'est logique, si le client n'a aucune idée de ce qu'il se passe, ce n'est pas d'un consultant qu'il a besoin.
Bon, il y a des intermédiaires entre les deux premiers items, mais en général c'est bien plus proche du premier que du second.
Sur le troisième je ne peux que proposer de fuir, sauf si vous vous sentez un mercenaire sans foi ni loi tant qu'on vous paye. De mon expérience ce n'est heureusement pas si fréquent pour peu que le consultant confirme les objectifs dès l'avant-vente. En tout cas j'ai réussi à passer au travers malgré plusieurs années de conseil et d'expertise.
C'est toutefois le rôle de beaucoup de missions pour les très gros groupes, au poins parfois de recopier sans ajout les diagrammes ou les conclusions déjà présentes au début de mission. Mais pour moi c'est plus un rôle de marketing interne qu'un rôle de consultant technique.
4 De Enerian - 12/02/2013, 14:11
Je pense que la confiance peut se situer à divers endroits.
Si je demande un avis à un expert, c'est que je lui fais confiance, je suis d'accord sur ce point. Mais pas confiance en sa capacité à me fournir une réponse absolue et irrévocable qui est forcément la bonne. Je lui fais confiance pour me fournir des éléments à même de faire progresser les choses. Je lui fais confiance parce que je sais que son avis sera de qualité, sensé, basé sur du solide. Mais ce ne sera pas forcément la solution idéale pour ce cas précis.
5 De Ronan - 13/02/2013, 13:50
Le fait que tu as employé le terme de "confiance" pour illustrer certains rapports développés ensuite a un peu dérouté ma lecture.
J'ai plutôt l'impression que l'on parle là de la légitimé et des attentes liées à la figure et au discours de "l'expert", sensé apporter une évaluation et de solutions plus ou moins savantes sur les "bonnes pratiques" de son champ d'expertise.
Dans l'exemple que tu nous montre avec les commerciaux, la remis en cause de l'expertise intervient pour des raisons qui ne sont pas propres à sa qualité: elle vient contrarier les décisions attendues, pour peu que les exigences ne se recouvrent pas.
Dans ce cas, je te rejoins, déléguer une compétence pour mieux l'ignorer ou vouloir l'infléchir en retour revient à faire porter les problèmes organisationnels au domaine technique. Mais cela ne remet pas nécessairement en cause sa légitimité.
Malgré tout, il est possible que le consultant développe une expertise qui ne considère pas assez les enjeux propres au projet, et aux contraintes décisionnels qui y sont liées. On peut donc (et en toute confiance ) se questionner ce genre d'approche un peu hors sol.
Je crois que c'est avant tout l'ambiguité de la position et de l'usage que l'on fait de l'expert que tu as soulevé...
6 De Démonarc - 21/02/2013, 15:53
Je dirais que la fin justifie les moyens, quand on a eu plusieurs fois affaire à des personnes incompétentes dans un domaine qui était leur profession, on se fait avoir quelques fois puis le ras de bol fait qu'on finit par se méfier.
Certain peuvent sombrer dans une véritable parano suite à quelques mésaventures.
Surtout dans certains domaine vu par la société comme la roue de secours des mauvais élèves, je pense notamment au milieu de la construction pour ne citer qu'eux.
Mais à vrai dire cela peut toucher n'importe quel milieu.